La Bourgogne serait-elle victime de son succès ? Le BIVB (bureau interprofessionnel des vins de Bourgogne) tire la sonnette d’alarme. Chez certains viticulteurs, des parcelles ont été entièrement détruites par des intempéries ou des maladies, tandis que beaucoup d'autres ont connu des pertes de 50 à 70% de leur récolte. Le syndicat viticole craint un assèchement des stocks de vin dans de nombreux domaines de la région.
"PAS D'INQUIÉTUDE POUR LA BOURGOGNE DES NANTiS"
Au domaine François et Antoine Jobard, à Meursault (2* au Guide Vert), la récolte a diminué de plus de 50% par apport à l’an passé : "Depuis 2008 les rendements sont difficiles à atteindre et les récoltes baissent chaque année d’environ 30%, excepté en 2009" raconte Antoine Jobard, à la tête de la propriété. Au Clos de Tart, en Côte de Nuits (3* au Guide Vert), "de 26/27 hectos habituellement, on est passé à 14/15 hectos cette année" explique le directeur Sylvain Pitiot. Selon ce dernier, il n'y a pourtant pas lieu de s'alarmer : "nous sommes habitués aux années à faibles rendements. Pour les petits producteurs ça va être dur, mais pour la Bourgogne des nantis, il n'y a pas d'inquiétude à avoir".
Au domaine du Clos du Roi en Bourgogne Coulanges, Magalie Bernard s’estime relativement épargnée : "Ces dernières années, on a fait en sorte de stocker et nous avons aussi évité les problèmes de gel et de maladies. Nous sommes donc un peu mieux lotis qu’ailleurs en Bourgogne." En 2012, cette viticultrice a néanmoins perdu un tiers de sa production. "La moitié de mes collègues ne font pas leurs rendements, quant à moi je ne les atteints pas depuis 2010. Des vignerons de la génération de mon père n’ont jamais connu ça !" renchérit-elle.
UNE DEMANDE DE PLUS EN PLUS FORTE
La faible récolte du dernier millésime - la plus petite depuis 1955 - est d’autant plus alarmante pour le BIVB qu’elle se conjugue à une demande en plein boom et des ventes record, en grande surface (+5,8%) mais aussi à l’export (+15%), soutenues par l'envolée des marchés asiatiques, car l’Europe – la Belgique et les Pays-Bas notamment - est, elle, en régression.
Antoine Jobard ne vend pas en grande surface, mais il a remarqué une hausse considérable de la demande : "En plus des marchés historiques comme l’Allemagne ou la Grande-Bretagne, où les ventes ne faiblissent pas, de nouvelles clientèles émergent, comme au Liban, où je n’aurais jamais pensé vendre ! Déjà, il y a dix ans, l’Italie et l’Espagne avaient amorcé le mouvement" ajoute-t-il. "Le commerce des vins de Bourgogne se porte bien, clame Sylvain Pitiot, ce sont nos clients qui vont être un peu frustrés. Mais après tout, c'est mieux que de se dire "mais qu'est ce que je vais faire de tout ce vin" !
"C’est mathématique : la plupart d’entre nous n’ont pas plus que l’équivalent d’un millésime en stock, ce qui est peu. Ceux qui travaillent avec la grande distribution, doivent avoir des volumes considérables pour suivre la demande. Si 2013 ressemble à 2012, certains se retrouveront sans doute en rupture de stock" explique Magalie Bernard. Là encore, elle s’en sort bien ! En ne vendant qu’aux particuliers, aux restaurateurs et un peu en Belgique, cette fille de maraîchers reconvertis vignerons évite le pire. "Les domaines vont être très sollicités par le négoce, qui cherchera à combler les quantités manquantes" anticipe-t-elle.
"ON ÉTALERA UN PEU PLUS LE BEURRE SUR LA TARTINE"
Face à ce phénomène, les vignerons se préparent au pire pour gérer au mieux leur stock. Au Clos de Tart, Sylvain Pitiot envisage de relancer de vieux millésimes sur le marché : "les réserves sont faîtes pour ça. On étalera un peu plus le beurre sur la tartine."
"Il faut lisser, étaler les ventes. Ne pas tout vendre en six mois pour ne pas être dépouillés ensuite pendant un an" confirme Antoine Jobard. Il insiste, les gros acheteurs ne doivent pas prendre le dessus sur les autres : "Si on le voulait on pourrait tout vendre à trois clients, ou si l’on en écoute d’autres, on vendrait deux fois la récolte en Meursault 1er cru ! Il faut partager, tout le monde doit pouvoir avoir un peu de vin… Évidemment en théorie c’est simple, mais en pratique beaucoup moins."
« Depuis vingt ans j’ai vu se succéder ces moissons et les vendanges de la terre, la feuillaison des arbres, les moissons et les vendanges, les feuillaisons de mon corps.» Jean Giono
Après l’été, on oublie, peu à peu, les salades et les légumes d’été pour se tourner vers des produits plus propices aux repas mijotés et aux tablées autour de la cheminée. On profite aussi des derniers beaux jours pour se consacrer à la cueillette des champignons, à l’affût des girolles, cèpes, pleurotes et mousserons.
Autour de nous, les vergers se parent de poires, pommes et coings, les vendanges, selon les terroirs, sont terminées, et nous offrent de beaux raisins mûris par le bel été.
La marée, elle, nous remonte le moral avec ses coquillages, Saint-Jacques, moules et huîtres mais aussi langoustes et homards, dorades, soles et truites sans oublier la chasse avec le gibier et le pigeon.
Coté jardin, le potager aussi a repris le travail et s’attelle déjà pour notre plus grand plaisir à nous livrer ses carottes, navets, poireaux, haricots, betteraves, fenouils, brocolis… et autres courges.
Avec tout cela, les recettes sont multiples et se profilent déjà pour de joyeuses bombances arrosées (avec la modération qui se doit) des flacons appropriés.
Pour commencer, les entrées de type tourte au légumes, risotto de potiron et épices ou velouté de champignons s’accommoderont volontiers de chardonnay charnus des terroirs de Meursault, Pouligny Montrachet ou Pernand-Vergellesses ou des charmeurs vins blanc du Rhône de type Saint Joseph, Hermitage ou Saint Peray.
L’automne n’est pas avare en possibilités de salades, par exemple les salades de choux épinard et noix, ou encore de pommes de terre, navet et chicorée. Elles seront délicieuses avec des vins blancs toniques de Touraine, des savoureux Chignin Bergeron ou des gracieux blancs de Graves mais aussi des gouleyants beaujolais villages ou de tendres pineaux de Loire pour les rouges.
Les coquillages cuisinés chauds façon aumônières de Saint Jacques aux champignons, moules aux pommes et cidre, le homard à l’Armoricaine ou la langouste à la crème de noix et champignons des bois, appelleront des vins blancs puissants, profonds et corpulents tels les côteaux du Languedoc, ou même le très aromatique Condrieu.
Le mois de Novembre n’est pas pauvre en poissons. Les goûteux rougets barbets façon choucroute de fenouil et carottes, les harengs marinés et carpaccio de betteraves et brocoli, seront sublimés par des grands blancs de Saumur, des Côtes de Provence ou par le Gewürztraminer truffé d’épices et de fruits. On pourra se complimenter de l’audace d’accords plus originaux bien que tout aussi friands avec d’élégants vins rouges de merlot tels de fringants Fronsac et autres nobles Pomerols !
La sole vapeur de thé et morilles ou de beaux filets de dorades de ligne, appellent à leur côté des vins blancs en dentelle comme on peut les trouver à Pouilly fumé, Macon, ou de profonds champagnes vineux à base de pinot noir idéalement d’Aÿ ou d’Ambonnay.
Evidemment, l’automne donne aussi et surtout l’occasion de déguster les gibiers de tout poil, et de toutes plumes, pour les amateurs. Alors, bien que les possibilités soient multiples et variées, il faudra, à l’exemple du chasseur, reconnaître dans les accords, les bons des mauvais.
Les cailles farcies au raisins, le faisan aux marrons ou même le canard sauvage rôti, supportent avec panache les puissants rouges de Nuits Saint Georges ou de Gevrey Chambertin comme les Médocs élégants, alors que les civets de sanglier ou de délicieux ragoûts de chevreuil nécessitent de puissants et solides vins rouges. Ainsi, les Madirans, Cahors et Châteauneuf-du-Pape aux saveurs relevées et robustes, escorteront avec majesté ce type de cuisine riche et conviviale.
Enfin, les douceurs ne sont pas à négliger, bien au contraire… plutôt nécessaires pour choyer notre moral en berne. On profitera ainsi des fruits pour de gourmandes tartes mais aussi des brioches aux raisins façon perdu et poires glacées au vin, carpaccio de pommes et coings pochés et glace cannelle ou pêches de vignes caramélisées sur une crème de marron et éclats de noisettes. Ils appelleront les friands et désaltérants Muscat de Rivesaltes, Tokay Pinot Gris vendanges tardives et Jurançon, pendant que les crèmes brûlées chocolat/whisky, crumble de Reine Claude aux épices et autres gratins de figues au sabayon et amandes se plairont en compagnie d’élégants Quarts de Chaumes, Monbazillacs et vins de paille.
Bon appétit !
Source: Trad'Consulting par Nicolas Geoffroy, Chef Sommelier, Château Cordeillan Bages, Pauillac via www.mesvignes.com